La reconnaissance de responsabilité du constructeur n’interrompt pas les délais de forclusion  : petit rappel

Cette absence d’interruption des délais de garanties peut avoir des conséquences non négligeables pour les maîtres d’ouvrages et acquéreurs en VEFA.

I – L’arrêt de la Cour de Cassation

Un arrêt rendu par la Cour de cassation le 9 octobre 2025 RG 23-20.336, et publié,  permet un rappel essentiel quant à la mise en œuvre par les maîtres d’ouvrage ou acquéreurs en VEFA des garanties légales et notamment les garanties :

  • De parfait achèvement
  • Des vices apparents
  • Décennale
  • De bon fonctionnement

, garanties qui doivent être actionnés sous certains délais qualifiés de délais de forclusion.

Cet arrêt a déclaré prescrite l’action engagée par un maître d’ouvrage sur le fondement de la garantie décennale et ce malgré une prétendue reconnaissance de responsabilité du constructeur dans l’apparition des désordres affectant un ouvrage.

II – Rappel des dispositions relatives aux délais de prescription et de forclusion

La distinction entre le délai de prescription et le délai de forclusion est une problématique récurrente en droit français, notamment en raison de l’absence de définition légale claire pour le délai de forclusion.

Ces deux délais concernent l’écoulement du temps et ses effets sur les droits, mais pour autant, ils présentent des différences importantes en termes de régime juridique et d’effets.

            II – 1. Le délai de prescription

Le délai de prescription est défini par l’article 2219 du Code civil comme « un mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps ».

La prescription extinctive entraîne la perte du droit d’agir en justice, mais elle laisse les parties libres de se comporter conformément à la situation juridique sous-jacente.

En d’autres termes, elle n’éteint pas le droit lui-même, mais seulement les voies de droit permettant de le faire valoir .

II – 2. Le délai de forclusion

À l’inverse, la forclusion éteint le droit d’agir et prive définitivement les parties de la possibilité de faire valoir leurs droits.

Elle est donc un événement instantané qui met fin au droit d’agir au moment où le délai expire

En revanche, le délai de forclusion, bien qu’il ne soit pas défini directement par le Code civil, est décrit comme une durée exceptionnellement limitée pour exercer un droit ou une action.

II – 3. Reconnaissance de responsabilité et interruption du délai de prescription uniquement

L’article 2240 du Code Civil dispose que :

« La reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. »

Cependant, l’article 2220 du Code civil précise que les délais de forclusion ne sont pas soumis aux règles de la prescription extinctive, sauf disposition légale contraire.

III – Application au cas d’espèce

En définitive, dans l’hypothèse où un constructeur venait à reconnaître sa responsabilité au titre de désordres affectant des ouvrages, cette reconnaissance n’interrompt pas les délais de garanties repris ci-avant.

A titre d’exemple, prenons un constructeur qui reconnaitrait sa responsabilité au titre de désordres dénoncés durant la période de parfait achèvement qui est d’un an à compter des opérations de réception des ouvrages.

Pour le cas où les désordres dénoncés n’auraient pas été repris par le constructeur durant l’année de parfait achèvement et que le délai de garantie venait à être expiré, le maître d’ouvrage ne peut se prévaloir en justice de la reconnaissance de responsabilité du constructeur pour solliciter sa condamnation sur le fondement de la garantie de parfait achèvement si le délai associé à cette garantie venait à être expiré.

Peu important la reconnaissance de responsabilité par le constructeur, si le maître d’ouvrage constate que l’entreprise n’intervient pas en reprise dans le délai de garantie et qu’il souhaite se protéger et se laisser la possibilité d’invoquer cette garantie, il doit assigner le constructeur avant l’expiration du délai de garantie.

Il convient en effet par la même occasion de rappeler que ces délais ne peuvent être interrompus que par la délivrance d’une assignation en justice et non la transmission d’une simple mise en demeure.

Vigilance est donc le maître mot pour éviter toute mauvaise surprise.

Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 9 octobre 2025, 23-20.446, Publié au bulletin

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